Lucie

No Makeup


En 3 ans et des brouettes de "blogging" (parce que oui, c'est comme ça qu'on dit il paraît), je peux affirmer haut et fort que mon rapport au maquillage a bien changé... En témoigne cet article qui date de septembre 2012 dans lequel je te confiais que, même pour aller au sport (sport que j'ai vite abandonné finalement... hum hum !), il fallait que je me mette quelque-chose sur le visage histoire d'être un minimum présentable. Non, je ne te parle pas de mettre un casque sur ma tête tel un Daft Punk en perdition, mais bien évidemment de maquillage, et plus précisément de fond de teint (ou d'un bidule similaire qui fait office de cache-misère).
En fait, c'est à partir de mes 16/17 ans que j'ai commencé à me maquiller le teint. Avant ça, il ne m'était jamais venu à l'esprit d'en utiliser, ma peau ne me posant aucun souci particulier quand je me regardais dans le miroir (mis à part le fait qu'elle soit pâle - d'où mon addiction aux fards à joues dès mes 12 ans). Et puis un jour, j'ai mis les pieds dans le monde fabuleux des fonds de teint (au grand désarroi de ma mère... Qu'est-ce que j'ai pu l'entendre ce "Tu ne vas pas mettre ça sur ton visage ?! T'en as pas besoin !"), histoire de voir si ça changeait vraiment quelque chose (note qu'à l'époque je n'étais pas encore une passionnée des cosmétiques et que je n'y connaissais donc pas grand-chose). Depuis ce jour, je n'ai plus pu faire sans. Depuis ce jour, et pour je ne sais quelle raison bizarroïde, il m'est devenu inconcevable de sortir sans me maquiller le visage.

Non, je n'avais rien à cacher. Sûrement quelques boutons sur le menton et quelques cicatrices (car ma peau claire marquait - et marque toujours - très vite) mais j'ai eu cette chance de ne pas avoir d'acné durant mon adolescence (et les années qui ont suivi). Simplement, je me trouvais plus jolie avec mon teint unifié (ce qui est une évidence, je ne vais pas dire le contraire aujourd'hui). Ou plutôt devrais-je dire "ma peau camouflée", car à l'époque (ben oui, c'était il y a plus de 10 ans), j'étais loin de la notion "maquillage pour le plaisir". C'était fond de teint obligatoire (même pour ne sortir que 15 minutes dans la journée) parce que dans ma tête, je ne pouvais pas me montrer sans. Gros blocage, fixation et manque de confiance en soi. Tout ça tout ça...
Finalement, durant les 10 dernières années (et même un peu plus), je me suis évertuée à "cacher" mon visage sous une jolie couche de fond de teint à chaque fois que je mettais un pied dehors et à chaque fois que j'étais censée voir quelqu'un (de la famille, des amis, un médecin, une boulangère, un facteur). Je ne sais pas pourquoi mais cela me paraissait totalement insurmontable de montrer mon visage à l'état sauvage naturel. Plus les années passaient, plus s'ancrait dans ma tête l'idée que sans maquillage j'étais moche et qu'avec, je l'étais déjà beaucoup moins. Comme si un bête flacon de fond de teint était une baguette magique qui me faisait carrément changer de tronche. Oui c'est ridicule, mais c'était exactement mon mode de raisonnement à l'époque (et jusqu'à tout récemment finalement).

Je suis de celles qui ont toujours eu du mal avec leur image et je ne sais pas trop pourquoi (attention, c'est l'instant psychanalyse de l'article). Je me rappelle simplement d'un jour où - je devais avoir 12 ou 13 ans, je me suis regardée le visage dans un miroir grossissant (l'objet qui ne devrait pas exister sur Terre, clairement !) à la lumière du jour pour la 1ère fois (j'entends par là, vraiment me regarder, pas jeter un simple coup d’œil). Je me suis trouvée moche, ou en tout cas moins jolie que ce que je pensais être dans ma tête jusque-là (vive l'adolescence et ses crises existentielles ! Ha ha !). Mis à part cela, rien de "traumatisant" à signaler. Pas de moqueries à l'école ni de trucs à la Freud issus de ma petite enfance (ou alors je n'en ai pas conscience - mais comment puis-je avoir conscience de ce qu'il y a dans mon inconscient ? Bobo à la tête !). Je pense aussi que, comme pas mal d'entre nous, je suis, au fil des années et sans même m'en rendre compte, tombée dans le piège des magazines et autres images retouchées à la télé, dans les pubs, au cinéma. Un peu partout quoi.
Ça peut paraître cliché de dire ça mais clairement, il est arrivé un moment où je n'étais même plus capable de savoir à quoi était censée ressembler une jolie peau dans la vraie vie par rapport aux peaux "parfaites" des gens "parfaits" qu'on voit dans des films et des magazines "parfaits". Je me revois encore me plaindre de mes points noirs, de mes pores dilatés, de mes 2-3 boutons mensuels et déclarer - sans honte aucune mais en y croyant vraiment - "J'ai une peau de merde." Salut, je m'appelle Lucie, j'ai 25 ans et je souffre de dysmorphophobie (grâce à moi, tu auras appris un mot aujourd'hui, elle est pas belle la vie ?).

Et puis les années ont passé... et j'ai commencé à bloguer. Au début, il n'était pas question de montrer mon visage. Non pas que j'étais timide ou que j'avais honte de quoi que ce soit mais je pensais pouvoir faire sans. Et puis un jour je me suis prise au jeu et j'ai osé publié une photo de moi. Et puis j'ai continué. Grâce à cela et avec le temps, j'ai appris à me regarder telle que je suis vraiment (en même temps, quand on prend des dizaines de photos de soi par jour, la réalité nous rattrape vite). J'ai pris conscience de mes qualités et, surtout, j'ai pris le parti d'assumer et d'accepter mes défauts (du moins les défauts que moi je me trouve). Cela m'a pris du temps, je ne vais pas te mentir. De la notion "maquillage pour me cacher", je suis passée à celle du "maquillage pour le plaisir". Car oui, maintenant je ne me maquille plus pour les autres, je ne me maquille plus en pensant au regard des autres. Je me maquille pour moi, parce que j'aime ça et, surtout, je me maquille quand j'en ai envie. Ce n'est plus une obligation comme cela a pu l'être auparavant.
Le plus gros déclic restera l'apparition de ma rosacée il y a un peu plus d'1 an maintenant (ahhh copine Rosa...). J'ai pris conscience que j'avais un vrai problème de discernement me concernant. Je me voyais d'une façon, les médecins et dermatologues (ainsi que mon mari et mes proches) d'une autre. Ce décalage permanent m'a fait me poser beaucoup de questions (mais vraiment ! En mode creusage de cervelle et ciboulot qui fume à ne pas fermer l’œil de la nuit). Par la force des choses, j'ai aussi été amenée à sortir sans maquillage un nombre incalculable de fois (pour mes rendez-vous à l'hôpital mais aussi parce que je ne pouvais plus du tout maquiller ma peau irritée et réactive quand Rosa a déboulé). Au début ça n'a pas été facile pour moi qui, pendant 10 ans, n'a pas pu mettre un pied dehors sans fond de teint ni correcteur. Et puis, à un moment donné, j'étais tellement au fond du trou (si je puis dire) que je n'étais plus vraiment à ça près.

Quelque-part, et ça peut paraître paradoxal, je m'assume plus facilement sans maquillage depuis que j'ai cette maladie de peau. Comme si, aujourd'hui, j'avais psychologiquement une bonne raison de trouver ma peau moche. Comme si je n'avais pas à en avoir honte parce que tout ce bazar rouge et irrégulier sur mes joues n'est pas dû à de mauvais gestes de ma part mais à un facteur que je ne peux clairement pas contrôler. Les années passant (la trentaine approche déjà !), j'ai aussi réalisé pour de vrai et pour de bon qu'une peau "parfaite" n'existe pas (mis à part chez une poignée de chanceuses) et que ce que je cherchais à avoir durant des années à grand renfort de produits pseudo-miraculeux qui coûtent une blinde (coucou le sérum Lancôme à 90 euros qui végète dans mon placard !) était du domaine de l'utopie. En témoignent les 3 mois d'attente pour avoir un simple rendez-vous chez le dermato. En témoigne le nombre impensable de mails que je reçois de la part de nanas qui souffrent d'acné, de rosacée, d'acné rosacée, de psoriasis, d'allergies, d'eczéma... En témoigne ce joli tweet de Lorde qui fait du bien et qui confirme un peu tout le bazar que je déblatère depuis 10 minutes (mais loin de moi l'envie de me réjouir du malheur des autres évidemment !)... Et sans aller dans les extrêmes, même une nana qui a une peau dite "normale" (sans problématique particulière j'entends) ne ressemblera jamais à cette minette soit-disant démaquillée que l'on peut voir dans les pubs (ah les pubs pour les démaquillants, les meilleures ! "Coucou j'ai enlevé tout mon maquillage mais j'en ai encore une sacrée tartine sur le visage... parce qu'il faut pas déconner, pour vendre faut envoyer du rêve !"... au risque d'en complexer plus d'une). Tout ça est évident bien sûr (faut être naïf pour tomber dans le panneau) ! Mais mine de rien, toutes ces images ont progressivement, insidieusement et inconsciemment eu tendance à dérégler ma perception de la "normalité".
Alors aujourd'hui, pour illustrer mon propos et au risque de te faire fuir, j'ai décidé de me montrer telle que je suis. Sans fard(s). Dans toute ma splendeur (et avec mes imperfections). Parce que, s'il y a bien un avantage à trouver à un blog par rapport à un magazine féminin, c'est qu'il est tenu par une nana lambda qui a cette incroyable liberté de pouvoir publier des photos non retouchées, photos qui ont la vertu de déculpabiliser bien des filles (et femmes !) un peu perdues avec leur image (comme je l'ai été pendant 10 ans). Et bien cette liberté, j'ai décidé de la prendre aujourd'hui. Et tu sais quoi ma petite Gibberishette ? Ça fait un bien fou (et ce n'est pas un poisson d'avril).


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